Je ne vais pas me tarder sur la conception de la citoyenneté en Grèce antique, à Rome ou sur ses principes modernes énoncés par la Révolution française en 1789. Des antécédents relatifs aux droits comme l’égalité politique et aux devoirs comme participation à la protection de la nation et à son développement assignés à chaque citoyen.
Cependant, je fais un constat amer et décevant de la perception citoyenne dans la société sénégalaise. Perception est particulièrement exceptionnelle du fait de comportement des hommes et des femmes à tous les niveaux.
Il faut signaler qu’il y a deux conceptions qui relient l’homme à son milieu physique, social et politique. Ils s’agissent de la citoyenneté et de la nationalité. Ces deux principes de société sont auréolés par le civisme.
Le concept citoyenneté dérive de ‘’Cité’’ et la personne qui y demeure est appelé le citoyen qui habite dans un terroir, une ville, un pays déterminé.
C’est pourquoi qu’on peut élever quelqu’un au rang de citoyen d’honneur d’une ville.
Les apatrides sont des citoyens parce qu’ils habitent sur un terroir mais ils ne l’ont pas à part entière parce qu’ils sont dépourvus de nationalité.
Le civisme est le comportement du citoyen dans un espace soit politique par le respect des lois, soit social par le respect des libertés et de la cohésion sociale dans la vie collective, écologique en respectant les êtres vivants non humains et confessionnel par le respect de la croyance d’autrui.
Le civisme s’acquiert par l’éducation socioculturelle et politique. Sa conception diffère d’un milieu à l’autre. Le civisme dans le monde rural est contraire à celui du milieu urbain.
Dans les villages, vu l’espace élargit, il n’est pas très grave de jeter des ordures derrières les concessions ou aux abords de voies publiques alors que ce comportement est incompatible avec l’espace urbain.
La nationalité est un acte politique qui scelle le pacte entre le citoyen et l’Etat moderne matérialisé par un document administratif et judiciaire. Elle est destituable.
Compte tenu de ces définitions simples, la citoyenneté se confond souvent avec le civisme mais depuis 1990, il est contesté de leur donner le même sens.
Le civisme au Sénégal
Il ressort de ce bref exposé que le comportement civique fait défaut au Sénégal.
Cela se manifeste dans tous les niveaux de la vie individuelle et collective, dans villages et dans les villes ; ce qui a fait réagir le président de la république dans son allocution du 4 avril 2019 lors de la commémoration du 59ère anniversaire de l’indépendance du Sénégal.
Les Causes de l’incivisme au Sénégal :
Les causes principales de l’incivisme sont multiples. On peut en citer :
Le manque d’éducation civique dans les foyers, les écoles et les villes, basée sur nos valeurs socioculturelles.
La préférence de la référence étrangère dans nos discours polico-religieux.
L’urbanisation galopante et anarchique due à l’exode rural sans qu’il y ait une éducation réelle et des mesures d’accompagnement pour que la nouvelle mutation socioculturelle soit parfaite.
La reculade des autorités étatiques devant les menaces des populations.
La préférence des autorités locales de percevoir des recettes dans l’anarchie plutôt que d’organiser les marchés de leurs communes.
La rigueur dans l’application des lois .
La prise de décisions hâtives, spontanées et circonstancielles sans qu’il y ait étude préalable appropriée pour cerner tout le problème.
La différenciation négative faite entre le bien commun (Etat) dont la gestion incombe à tous et le bien personnel.
La non corrélation entre la jouissance de la liberté individuelle et le respect de la liberté collective.
La confusion chez les jeunes entre la notion de la démocratie, la conscience politique, l’Etat de droit et celui de la liberté.
Le clientélisme politico-confrérique.
Les conséquences de tous ces problèmes sont multiples et variées. Il s’agit de l’occupation de la voie publique de manière permanente ou temporaire.
Les marchands ambulants, les mécaniciens, les vendeurs élisent domicile dans la rue. Les organisateurs des veillés religieuses, des baptêmes, des funérailles, des meetings politiques, des Sabars, des Tanebeer, des Symbes, des petits camps barrent les rues et ruelles quand et comment ils veulent sous le regard complaisant des agents du service publique.
Il serait opportun d’affecter des agents de la sécurité de proximité dans les marchés et les grandes artères des villes pour éradiquer le fléau de la mendicité des enfants et l’occupation anarchique de la voie publique.
Au Maroc par exemple, les agents dits ‘’forces auxiliaires » sillonnent les marchés et organisent l’occupation de quelques voies publiques à des horaires autorisés souvent entre le 17H et le 19 H.
Au Sénégal, l’indiscipline, l’inconscience et l’incivisme sont de plus en plus notés au milieu de la nouvelle génération consécutive au manque de référence nationale et d’éducation.
La citoyenneté et le civisme dans l’islam
L’islam étant la dernière religion révélée qui s’adresse à tout le monde ne connait pas la notation de nationalité par contre elle endosse les deux concepts : la citoyenneté et le civisme.
La notion de ‘’Daarul islam’’ traduit parfaitement la citoyenneté en Islam car les gens qui y habitent ont les mêmes droits et devoirs et sont appelés à se respecter et respecter leur environnement naturel et social et leur différence de croyance.
Le civisme étant le comportement et la bonne manière de vivre dans la collectivité ; il est de ce fait partie intégrante de l’éducation islamique énoncée par le Prophète (PSL) qui dit : “J’ai été envoyé pour parfaire la noblesse du comportement”.
La croyance d’un musulman ne serait parfaite si son comportement est malsain comme le dit le prophète (PSL): “le religion est le comportement”.
Toutes les pratiques cultuelles : la prière, le jeûne, la Zakât, le Haddj ont pour but essentiel de parfaire ce comportement individuel et collectif. C’est pourquoi il est recommandé d’accomplir la prière, le pilier garant de ce comportement, dans la quiétude et en groupe.
La pollution sonore :
Le Coran dit : ‘’Sois modeste dans ta démarche ! Baisse la voix quand tu parles, car le plus horrible des cris est bien le braiment de l’âne ! s.31/V.19. et dans un autre verset il dit. Les serviteurs du Miséricordieux sont ceux qui marchent humblement sur terre. Ceux qui répondent avec douceur aux ignorants qui les interpellent…’’ s.25/63.
Le comportement social :
Le prophète (PSL) dit : « Où que tu sois crains Allah ; fais suivre la mauvaise action d’une bonne ; elle l’effacera et use d’un bon comportement envers les gens » (musulmans et non musulmans).
Comportement environnemental
Le Prophète (PSL) dit : « Ne vous asseyez pas au bord de la route ! … Si vous y tenez absolument, donnez au moins à la rue son droit… » qui est de « Baisser le regard, s’abstenir de faire du tort aux passants, rendre le salut, commander le bien et interdire le mal».
Il y a parmi les actes maudits la défécation sur la route comme le dit le Prophète (PSL) : « Eviter les deux actes maudits qui sont : déféquer sur la route ou à l’ombre sous laquelle les gens s’abritent».
Rendre la rue propre est l’un des aumônes énumérés par le Prophète (PSL) en disant ‘’… nettoyer le chemin des saletés est une aumône». Il dit également : «J’ai vu un homme jouir de son séjour au Paradis, car il a enlevé un arbre qui barrait la route aux passants ». Enlever un obstacle de la route est l’une des 60 ou 70 branches de la foi ‘’ … la moins élevée est d’ôter un obstacle de la route».
On entend de ces hadiths que barrer la route quel que soit le motif, jeter des ordures et l’occupation de la voie publique constituent des actes condamnés par l’islam.
L’islam préconise la propreté vestimentaire, environnementale, de la maison comme le dit le Prophète (PSL) :’’la propreté fait partie de la foi)’’ il a même interdi d’uriner dans l’eau stagnante ou d’y jeter des saletés.
Nos vaillants guides religieux ont parlé du civisme qui va de pair avec l’éducation religieuse. Chacun d’eux a écrit un ouvrage sur ce domaine.
On retrouve également dans leurs recueils poétiques de passages qui font allusion à ce domaine.
Comprenons enfin que les gens sont des troupeaux donc il faut que le berger soit armé certes du bonté et de patience mais aussi de bâton pour pouvoir les guider dans le bon chemin.
Devant tous ces problèmes complexes qui entravent le développement, l’Etat est appelé plus que jamais à intervenir pour jouer son rôle régalien.