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DÉfiance Et Indiscipline

En voyage à Tokyo il y a un mois, j’ai posté sur un réseau social une vidéo du célèbre croisement de Shibuya, au cœur de la capitale japonaise, considéré comme le carrefour piéton le plus fréquenté au monde. Toutes les deux minutes, les feux de signalisation s’allument ; les véhiculent s’arrêtent pour laisser traverser, aux heures de pointe, pas moins de 2 500 personnes. Une véritable ruche humaine. Mais, tout se passe dans une parfaite organisation. Quand j’ai mis en ligne cette vidéo, un ami, très perspicace, perçut très vite le sentiment qui m’animait : l’éblouissement. Il m’envoya donc ce message : « La première chose qui impressionne toujours le Sénégalais en voyage, c’est l’ordre et la discipline ailleurs. Ça, il ne connaît pas ». Mon cher ami, tu as tellement raison ! Effectivement, on est impressionné que par ce qu’on ne connait pas. On se surprend même à se demander, candidement et béatement, pourquoi on ne peut pas faire comme les Rwandais, comme les Japonais qui, en matière de discipline et de respect de leur cadre de vie, sont des modèles achevés.

Lorsque la discipline s’installe, son corollaire, la défiance, prend aussi ses quartiers. Le manque de discipline du Sénégalais en général est devenu un disque rayé, mais quand des actes de défiance vis-à-vis des autorités ou des forces de l’ordre s’y joignent, ça devient inquiétant. Ces derniers jours, deux faits, peu médiatisés, renseignent sur ce sentiment profond de défiance de l’autorité. Le premier s’est passé à Koungheul, l’autre au Caire.

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A Koungheul, le 16 juin dernier, des conducteurs de motos « Jakarta » ont saccagé la brigade de gendarmerie. La raison ? Ils refusent l’instauration d’une police d’assurance et la carte grise. Autrement dit, ils manifestent, brulent des pneus, mettent à sac des kiosques et des infrastructures commerciales juste parce qu’ils ne veulent pas se conformer à la loi. L’éloge de l’illégalité, en quelque sorte. Peut-on exiger, sous prétexte qu’on est soutien de famille, d’exercer illégalement une activité ? Pourtant, c’est l’argument que les marchands tabliers tiennent très souvent lorsque des mesures de déguerpissement les visent. La formule consacrée ? « Qu’on nous laisse travailler, on ne veut pas voler ni agresser », avancent-ils, comme si le fait de voler ou d’agresser était donné à tout le monde. Ils oublient qu’il faut un sacré cran pour jouer au larron ou au petit criminel. Les événements de Koungheul ne sont pas sans rappeler les scènes de guérilla urbaine notées à Kolda, en 2017, lorsque des jeunes conducteurs de motos « Jakarta », déchaînés suite à un accident d’un des leurs impliquant un policier, avaient envahi et mis à sac le commissariat de police de la ville ainsi que les locaux du Trésor public. Il a fallu l’intervention du Groupement mobile d’intervention (Gmi), épaulé par des militaires, pour rétablir l’ordre. Heureusement sans bain de sang.

Cette indiscipline, cette défiance vis-à-vis des institutions s’exportent même au-delà de nos frontières. Alors que l’équipe nationale du Sénégal s’apprêtait à jouer son premier match de la Can au Caire, un groupe d’étudiants, trop impatients d’entrer au stade, a caillassé le cortège du ministre des Sports et de l’ancien Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye. Résultats des courses ? Vitre arrière d’un véhicule réduite en miettes. Cela, juste parce que celui qui détenait les billets d’entrée au stade qu’on leur avait gracieusement offerts avait eu un retard. Pour si peu alors que match était loin d’avoir commencé.

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Devant tant d’incivisme, d’indiscipline et de défiance, la proposition faite, il y a deux semaines, par d’anciens hauts gradés de l’armée au cours d’un dîner-débat mérite d’être étudiée : service militaire obligatoire après le bac pour une durée de trois mois pour les nouveaux bacheliers et deux ans de service civique universel pour les étudiants en Licence et en Master.







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