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L’humain Est Le VÉritable Ennemi De L’humanitÉ

L’humain est pour notre planète et le vivant une lourde charge. Le vivant subit au quotidien les virulents assauts dévastateurs de l’humain, cet indomptable voisin de palier des êtres vivants qui ne peut s’empêcher apparemment de provoquer des déséquilibres écologiques néfastes à la survie des espèces et des écosystèmes. La nature de notre existence humaine compromet toute chance de survie pour beaucoup d’espèces, pourtant indispensables et vitales à l’humanité. L’humain, faute de pouvoir incarner le véritable leadership écologique, fait preuve au quotidien d’un véritable loosership écologique se traduisant par de néfastes agressions contre la nature, le vivant et soi-même. L’humain est-il sans humanité ? Ceci n’a rien d’inhumain. Bien au contraire, « humain trop humain » dit justement le philosophe Nietzche.

Le stade des menaces contre l’évolution humaine est dépassé. L’humanité redécouvre la fragilité de l’être humain, traqué par ses propres méfaits, en sursis dans le couloir de la mort. L’humain, confronté à l’accentuation de sa vulnérabilité qui malmène sa volonté, découvre subitement la fragilité de l’être, l’impuissance de la puissance et la solution de l’antidote écologique. L’humain est le véritable ennemi de l’humanité. Il est la racine des maux de toutes sortes que nous endurons. Il n’aurait pas mérité pas d’être au centre du combat à mener pour la réhabilitation de notre planète si on ne pouvait pas se passer de lui. Le remettre au centre des préoccupations ne serait-ce pas, d’une certaine, offrir du viagra au pervers sexuel qui vient d’être libéré ?

Pierre Rhabi raconte ainsi, dans son ouvrage intitulé Ce que la nature nous dit, cette histoire destinée à éveiller les consciences :

« Une planète d’une autre galaxie rend visite à la Terre et lui dit :

  • Oh, ma pauvre ! Comme tu as l’air mal en point, malade, harassée ! Que t’est-il arrivé ?
  • Ce à quoi la planète Terre répond : « Ne m’en parle pas, j’ai attrapé l’humanité !
  • Ne t’inquiète pas, reprend son amie, je l’ai eue moi aussi, je m’en suis débarrassée et tout va mieux !

Notre planète est en train de subir le virus de l’humain. Nous ne savons pas où nous allons, mais nous y allons en vitesse, les yeux bandés par l’insouciance et la confiance excessive. Et le pire est à craindre si ne se développe pas davantage et massivement une écocitoyenneté responsable. Cette nécessaire prise en compte de la biodiversité passe par l’initiation d’une biopolitique qui ne renvoie pas forcément aux individus mais aux rôles attendus d’un véritable leadership ; donc pas à un leadership individualisé mais à un communityship suscitant à un véritable citizenship sensible aux préoccupations écologiques. L’enjeu est de repenser ce que doit être la vie ; notre rapport aux êtres et aux choses.

Cette biopolitique ne doit pas être centrée exclusivement sur l’humain mais devra prendre en compte le vivant pour éviter à notre planète de rendre l’âme du fait du « naturicide » perpétré par les humains qui égorgent avec une cruauté inqualifiable l’écosystème pour leur loisir, leurs délires ou des choses totalement inutiles et futiles. Cette biopolitique devra revisiter les fonctions de production, de régulation et d’esthétique de la nature accablée par le décret indécent et indigne des hommes contre le vivant qui les entoure. Reconcentrer nos actions sur l’essentiel, le vital et le primordial qui ne sauraient être réduits à des considérations purement et exclusivement matérialistes. Passer à des préoccupations post-matérialistes : qualité de l’eau, de l’air, des sols, etc.

Il est possible de nourrir dans l’abondance un nombre considérable d’êtres humains sans porter atteinte à la nature. L’humanité peut pourvoir à ses besoins dans l’aisance et dans une vie honorable sans infliger à la nature le plus grand mal. Telle est la triste réalité qui a conduit l’environnement à végéter dans un état pitoyable.

La lecture de La ferme des animaux de Georges Orwell est édifiante et à méditer. En voici un extrait : « L’Homme est la seule créature qui consomme sans produire. Il ne donne pas de lait, il ne pond pas d’œufs, il est trop débile pour pousser la charrue, bien trop lent pour attraper un lapin. Pourtant le voici le suzerain de tous les animaux. Il distribue les tâches entre eux, mais ne leur donne en retour que la maigre pitance qui les maintient en vie. Puis il garde pour lui le surplus. Qui laboure le sol : Nous ! Qui le féconde ? Notre fumier ! Et pourtant pas un parmi nous qui n’ait que sa peau pour tout bien. Vous, les vaches là devant moi, combien de centaines d’hectolitres de lait n’avez-vous pas produit l’année dernière ? Et qu’est-il advenu de ce lait qui vous aurait permis d’élever vos petits, de leur donner force et vigueur ? De chaque goutte l’ennemi s’est délecté et rassasié. Et vous les poules, combien d’œufs n’avez-vous pas pondus cette année-ci ? Et combien de ces œufs avez-vous couvés ? Tous les autres ont été vendus au marché, pour enrichir Jones et ses gens ! Et toi, Douce, où sont les quatre poulains que tu as portés, qui auraient été la consolation de tes vieux jours ? Chacun d’eux fut vendu à l’âge d’un an, et plus jamais tu ne les reverras ! En échange de tes quatre maternités et du travail aux champs, que t’a-t-on donné ? De strictes rations de foin plus un box dans l’étable ! »

Le vivant est le chantier prioritaire. Vivre. Bien vivre. Mieux vivre. C’est possible. Des solutions existent. L’enjeu est d’améliorer le vivant (plus large) et non exclusivement l’humain qui doit s’améliorer. L’humain fait partie de ce vivant. Il est en cohabitation avec d’autres êtres vivants dont sa survie dépend en grande partie de leur préservation. Des espèces animales, végétales disparaissent aujourd’hui et menacent l’évolution du vivant. Notre adaptabilité est menacée. Nous filons du mauvais coton avec Dame Nature et risquons d’être confronté à la fin de notre adaptabilité. Splendide, l’histoire de l’humanité vire au tragique. Le monde a attrapé l’humanité. L’humanité est comme un virus pour le monde vivant. Dans tous les domaines, les problèmes s’accumulent en dépit des connaissances et savoirs énormes, malheureusement plus au service du matériel que du vivant. On voit du béton et de l’acier partout au lieu de limiter l’urbanisation à tout va. Par ailleurs, le problème c’est moins le nombre relativement bas de la population sur terre que le mal que ces populations infligent à la terre et au vivant et donc à elles-mêmes.

Comment mieux faire fonctionner la société, nous qui, depuis longtemps, sommes dans un monde carcéral ? Cette prison des mauvaises habitudes existentielles nous conditionne depuis la naissance. Nous savourons la vie dans les excès et les futilités.

Des solutions pour mieux vivre existent. Il nous faut être attentif physiquement et intellectuellement à l’écologie. Avoir le courage de reconnaître que les modèles utilisés jusqu’ici ne fonctionnent plus. Si l’on veut encore profiter des merveilles de la nature, il nous faudra faire preuve d’une nouvelle intelligence écologique prenant en compte la priorité des choses utiles, essentielles, vitales et primordiales. Le retour des espaces verts en zones urbaines est déjà une bonne chose mais le reboisement doit aller au-delà des préoccupations esthétiques. Il nous faut être à l’écoute de la nature qui nous parle et que nous n’écoutons plus. La situation écologique dramatique que nous vivons ressemble à un examen de passage. Il nous faut donc êviter de rendre une feuille blanche synonyme de zéro.

Expérimenter l’agroécologie. Faire preuve de sobriété. Repenser les modes de production, de consommation et de construction. Redonner la vie aux sols tués. Lutter contre le réchauffement de la planète. Recycler et gérer tout ce que nous jetons dans la nature. Mieux gérer l’eau. Passer aux énergies propres renouvelables. Entreprendre une économie solidaire ancrée sur nos besoins et nos moyens. Vivre sans être dans l’obsession de la croissance. Construire un monde nouveau. Sortir des discours et des théories pour être dans un pragmatisme rassurant. Montrer notre résilience ou capacité à encaisser les chocs. Créer un nouveau projet pour l’humanité et le vivant. Embarquer l’humanité vers un monde meilleur. Sortir de la prison de nos mauvais choix. Nous émanciper de nos propres contradictions. Reconsidérer la présence et l’utilité des autres espèces et êtres vivants. La biodiversité. Promouvoir l’effort d’une pensée biosystémique. L’avenir n’est pas inéluctable. Il y a des voies à suivre et des voix à entendre. Habiter écologiquement le monde. Aucun compromis n’est désormais possible ou envisageable face à l’urgence écologique. Face à l’épreuve du réel, il ne nous est plus permis de regarder avec dédain ce qui se passe sous nos yeux contre le vivant si nous voulons nous préserver des agents pathogènes et infectieux.

Un mauvais chef, c’est tout ce qu’il faut pour rendre un peuple malheureux et le défi insaisissable. Pour relever le défi, il nous faudra de vrais chefs émancipés de la mystique idéologique, historique et politique du chef qui a participé des pires déconstructions écologiques. Cela passera par l’émergence d’éco-leaders ayant la capacité et le courage d’agir et de faire agir dans le sens de la préservation de notre écosystème qu’i faut préserver de l’anarchie. Le besoin de chef n’est pas un pouvoir personnel appelé à régner de connivence avec les progrès de la modernité libérale capitaliste. L’enjeu écologique a besoin d’un vrai chef qui ne gère pas seulement le statu quo mais qui impulse une dynamique transformatrice adhérant à ses projets et à sa vision pour changer la société. Toute autre posture ne serait que des grimaces et acrobaties politiciennes sans intérêt, sans conviction, sans vision, et sans éthique destinées uniquement à dérouler son plan de carrière politique.

En effet, avec les politiciens à qui l’humanité a laissé le destin du monde entre leurs mains, l’élection est l’horizon ultime du discours. Mais en réalité, au bout du compte tout change pour rester le même avec eux, aguerris aux accommodements, renoncements et complicités. Il urge ainsi de repenser notre rapport avec le politique, le pouvoir, l’argent, la santé, l’environnement, la citoyenneté, la pensée, la science, le savoir, l’humain, le vivant.

L’actualité du coronavirus révèle notre vulnérabilité sanitaire et discrédite les manifestations de glorification de l’œuvre politique. L’imprévisibilité de la marche de l’histoire peut toujours être bousculée et piétiner au passage notre supposée invulnérabilité sécuritaire. Le coronavirus nous rappelle ce qu’il y a d’essentiel, de vital et de primordial. Changer de paradigme, c’est changer d’essentiels et de priorités ; d’obsessions et de rituels, de réflexes et de trajectoires politiques. Revenir à la politique des choses utiles et essentielles ; à un nouvel art de vivre. Nuire au mal et servir le bien. Telle est l’essence du politique.







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