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Nouvel Ordre National Avant Le Nouvel Ordre Mondial

Lettre au président de la République

Monsieur le président,

L’appel à un nouvel ordre mondial que vous avez lancé est une excellente idée. Pour qu’il ne se transforme pas en slogan, chacun doit jouer sa partition. Alors, permettez-moi de vous recommander vivement de commencer par mettre en place un nouvel ordre national.

Il s’agit tout d’abord de mettre fin à l’impunité doit jouissent ceux qui ont été épinglés par les corps de contrôle et qui sont même quelques fois promus au nez et à la barbe des citoyens à qui on demande de respecter scrupuleusement la loi du couvre-feu. Récemment, nous avons été surpris d’apprendre de gros scandales qui montrent que certains, parmi ceux qui nous gouvernent, doivent démissionner ou, à défaut, être remerciés au plus tôt et traduits en justice.

Nous avons appris qu’à dix jours de l’élection présidentielle de février 2019, le directeur de la Senelec a signé un contrat gré à gré d’un montant de 187 milliards de francs Cfa pour dix ans avec une start-up naissante (Akilee) présentée comme une filiale  de l’entreprise. Devenu ministre, l’ex-directeur a demandé un effort financier conséquent aux citoyens pour renflouer la trésorerie de la dite société nationale. Le nouvel ordre appelle à la démission du coupable et à la fin d’un système qui permet de tels agissements !

Monsieur le président, comment apprécier qu’un chef d’Etat qui veut bâtir un nouvel ordre mondial nomme son beau-frère ministre et lui confie un champ aussi vaste que:

  • Ministre du Développement communautaire, de l’équité sociale et territoriale,
  • Maire d’une grande ville
  • Mais aussi lui confie la gestion plusieurs projets dont :

  • le Programme d’Urgence de Développement communautaire (PUDC) ;
  • le Commissariat à la Sécurité alimentaire ;
  • le Programme d’Urgence de Modernisation des Axes et Territoires frontaliers (PUMA) ;
  • le Programme de Modernisation des Villes (PROMOVILLES) ;
  • la Délégation Générale à la Protection Sociale et à la Solidarité Nationale (DGPSSN) ;
  • l’Agence nationale de la Couverture Maladie Universelle (ANCMU) ;
  • le Programme National des Bourses de Sécurité Familiale (PNBSF).

Le beau-frère-ministre (successeur encagoulé ?) vient récemment d’être accusé de gestion très controversée de l’achat, du transport, en attendant la distribution, des denrées alimentaires sensées soulager un million de familles impactées par la pandémie du Covid-19. Le nouvel ordre appelle à mettre fin au népotisme de manière générale et à exiger la reddition des comptes à tous ceux qui se seront rendus coupables de non respect aux règlements des marchés publics, en particulier en ces temps où une grande majorité des sénégalais rencontre de grandes difficultés.

Monsieur le président, comment comprendre que des licences de pêche soient octroyées en ces moments de surexploitation de nos côtes et donc de raréfaction des ressources halieutiques ? Pour rappel, on attend encore les résultats de la commission d’enquête sur de précédentes attributions, avec en toile de fond la sénégalisation rapide et fictive des navires chinois. Ces pratiques symbolisent l’ancien ordre mondial qu’il va falloir enterrer.

Monsieur le président, dans ce nouveau monde, un pays pauvre ne devrait pas avoir de ministres milliardaires alors qu’ils ne l’étaient pas au moment de leur entrée en fonction. De même, les institutions devront avoir une utilité avérée, être dotées de budget responsable et dirigées par des personnes méritantes. L’exemple vient d’en haut ; et ce qui se passe au sommet de l’Etat constitue des mauvais exemples qui contribuent à créer le type de sénégalais que nous déplorons aujourd’hui.

Monsieur le président, cette pandémie nous oblige à faire de l’introspection et de repenser notre mode de vie ainsi que les valeurs essentielles. C’est aussi une occasion de revisiter les politiques publiques et de leur donner leur rôle primaire, à savoir servir les populations.

Le monde a été secoué profondément et durablement par cette épreuve. Le nouvel ordre mondial se construit dès maintenant. Les pays cherchent à résister à l’ouragan covid-19 en prenant des mesures urgentes pour y faire face, mais aussi en participant aux recherches scientifiques et en se préparant aux secousses sanitaires qui ne manqueront pas dans l’avenir. Ils revoient leur politique sanitaire en termes d’architecture territoriale, d’infrastructures et de ressources humaines. Ils mettent les conditions de développer les solutions numériques pour améliorer les services dans tous les secteurs.

Monsieur le président, les peuples africains restent les laisser pour compte de l’évolution du monde. Cette crise est aussi une opportunité pour se réinventer. Au nom de la jeunesse désespérée qui préfère mourir dans les mers, les déserts et les montagnes faute de pouvoir se projeter dans leurs pays, nous appelons les gouvernements à s’unir, non pas pour partager les recettes de maintien au pouvoir, mais pour dessiner un modèle de développement inclusif orienté vers la formation professionnelle qualifiante, l’industrialisation, plutôt que l’exportation de nos ressources, et surtout la bonne gouvernance de nos nations.

Ce sont là, monsieur le président, quelques chantiers à initier pour donner sens au concept « nouvel ordre mondial » afin que celui-ci n’entre pas au panthéon des slogans.

Mme Diop Blondin Ndeye Fatou Ndiaye est membre de la Plateforme Avenir Senegal Bii Ñu Bëgg







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