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De La MontÉe En Puissance De L’anti-france En Afrique De L’ouest

Le problème avec la France, ce grand bailleur de l’Afrique de l’Ouest, c’est l’ambiguïté entre le sentiment d’amour qu’on lui porte et la dépendance structurelle de nos économies vis-à-vis d’elle.

Voici pourquoi la réforme du Franc CFA est une tâche délicate que l’Afrique devra réussir en gérant l’implication de la France pour ne pas réveiller de tensions dans la région autour de la création de cette monnaie unique, qui ne doit pas être un avatar du franc CFA, ni un mécanisme de substitution vécu comme une dépendance humiliante.

Oui le monde change et la France doit l’entendre si elle ne veut pas que la jeunesse africaine poussée au front par les souverainistes et panafricanistes la somme de ne plus toucher à l’Afrique ou de lui ficher la paix !

Bien sûr pour ma génération, il y a toujours cet attachement à la France et une partie de notre histoire commune mais la réalité aujourd’hui c’est que les solutions du passé ne sont pas à la hauteur des enjeux économiques et démographiques du continent.

D’une part, la France n’est plus la grande puissance coloniale qu’elle fut, mais surtout, la mondialisation et sa marche inéluctable a depuis plusieurs années changé la donne et redistribué les cartes entre les acteurs internationaux comme la Chine ou le Moyen-Orient qui ne tarderont pas si l’on n’y prend garde à contrôler à leur tour l’économie africaine.

Ce que les partenaires contemporains de l’Afrique ont bien compris, c’est que le XXIe siècle est le siècle africain, tant la croissance démographique y est forte et les besoins considérables.

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En ce qui nous concerne au Sénégal, le pays connait depuis plus de dix ans une croissance économique record, de 5 à 6 points annuelle, et même s’ils ne sont pas suffisants pour éradiquer l’extrême pauvreté d’une partie de la population, ils sont une garantie qui nous permet de nous tourner vers d’autres partenaires, en particulier la Chine, dont la percée en Afrique rappelle que le continent n’est désormais plus une chasse gardée.

La France mesure-t-elle pleinement ce grand changement qui est en train de se produire dans le monde ? Car à part réécrire mille fois la page de la colonisation, multiplier les paroles de repentance et dénoncer les dérives de la «Françafrique », les contours d’une nouvelle relation d’amitié désintéressée entre l’Afrique et la France sont loin de se dessiner. Pire encore, l’hypocrisie est à son comble entre le discours à succès que l’on connait, cette Afrique qui «décolle », « novatrice et dynamique » et la réalité sur le terrain social et sociologique.

Dans la société française, combien encore aujourd’hui de jeunes et moins jeunes trouvent les portes closes à cause de leur couleur de peau ? Combien sont bloqués dans leur ascension sociale ? Combien occupent des postes en vue ou à responsabilité ? En France en 2020, être banlieusard, musulman et noir, c’est encore être victime de discriminations ordinaires. Un racisme vécu tous les jours qui se nourrit de préjugés :  » Dans leur tête, quand tu es noir, la violence, tu connais… »

Comment s’étonner dès lors que resurgisse en Afrique francophone le sentiment antifrançais, même s’il va de soi qu’il faut le réfréner et le condamner, au nom de la tolérance et du vivre-ensemble. La France, à travers ses équipes gouvernementales successives, tente de se faire pardonner ses fautes en Afrique par l’usage politicien et intéressé de slogans opportunistes. Ne devrait-elle pas, tout au contraire, se lancer dans la refondation du partenariat culturel pour une relation d’amitié vraiment renouvelée ?

Il est plus que temps avant toute chose que les préjugés cessent et que la société française change et se transforme en profondeur. C’est un devoir de justice et de vérité. Non, la couleur de peau ne vous définit pas, ne limite pas vos possibilités, bien au contraire. Mais si on vous fait comprendre dès votre naissance que votre couleur est différente, vous êtes déstabilisé et fragilisé.

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Il faudrait pour changer les choses une prise de conscience historique, notamment des ex-puissances coloniales, qui devront en premier lieu rendre les biens culturels accumulés durant la période coloniale !  Et tant pis pour ceux qui pensent que rendre les biens culturels à l’Afrique ne sauvera pas la culture africaine, car ce ne sera plus leur affaire !

A ce sujet, et comme on ne peut pas tout reprocher à la France qui est loin d’être majoritairement raciste et nationaliste, je veux saluer l’engagement très fort sur les patrimoines africains du président Macron « pour que la jeunesse africaine ait la possibilité d’accéder à son patrimoine, à son histoire en Afrique ».

Pour autant, même si restitution et réparation sont indissociables pour apaiser les esprits, restaurer la confiance et retrouver l’estime réciproque, il restera un long chemin à faire contre l’oubli et l’amnésie.







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