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Ministrere De La Sante Et De L’action Social, Paradoxe Ou Privilege ?

Les établissements publics de santé (EPS) et les archives départementales assument des responsabilités similaires tout au long de la vie des archives en assurant la collecte, la conservation, le classement et la communication des archives. Toute structure digne de ce nom, a besoin d’une mémoire. C’est là tout le sens des archives. Mais les archives hospitalières constituent un sujet que les gouvernants cernent encore mal. Pire, il n’est trop souvent regardé que sous l’angle « d’utilité administrative ».

Cette notion recouvre au quotidien un champ bien plus vaste et implique des effets et conséquences similaires quel que soit le type d’archives traité. C’est au cours de leurs différentes pérégrinations, que les professionnels de l’information documentaire ont constaté l’absence souvent flagrante de conscience de ce que sont les archives des établissements de santé dans un pays qui tend vers l’émergence.

Dès lors, comment dans un contexte sans mémoire aucune disais-je ou plutôt sans mémoire fiable, bâtir un système de santé cohérent vis-à-vis de son histoire basée sur du factuel, traçable et tracée, et en accord avec les progrès scientifiques futurs ? Les archives hospitalières ne recouvrent donc que l’ensemble des documents produits par les établissements publics ou privés gérant un service public et les établissements médico-sociaux administrés par un établissement de santé public. Aussi ne sont concernés par la réglementation des archives hospitalières que les EPS ou les établissements de statut privé ayant une mission de service public et produisant des soins.

L’appartenance à cette catégorie d’établissements produisant des archives hospitalières implique donc l’application stricte des dispositions relatives aux archives publiques, et des dispositions relatives aux archives hospitalières, notamment les modalités, les responsabilités et les durées minimales de conservation des archives hospitalières.

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Et pourtant, la législation est claire en la matière, notamment la Loi 98-08 du 26 Août 1998 portant Réforme hospitalière, article 29 stipule: « les établissements publics de santé ont l’obligation de conserver leurs archives et les pièces justificatives des opérations de recettes et de dépenses pendant une durée de dix ans ; le non-respect de ces dispositions constitue une faute de gestion engageant la responsabilité personnelle du Directeur et des agents concernés devant la cour de discipline budgétaire ». Ainsi, les archivistes jouent un rôle important dans les établissements médico-hospitaliers. Cependant, les autorités sanitaires semblent méconnaître la contribution essentielle des archivistes au fonctionnement administratif et à la prise en charge des patients dans les structures hospitaliers.

En effet, aucun poste d’archiviste n’a été pourvu lors des derniers recrutements du Ministère de la santé et de l’action sociale. Et pourtant le département porte un projet pour la digitalisation du dossier patient partagé. Un tel système ne pourrait se réaliser sans le concours des archivistes car l’archivage constitue un préalable à tout projet de la gestion électronique des documents (GED) ou un système d’archivage électronique (SAE). C’est pourquoi, l’absence d’archivistes et le manque de services d’archives constitue l’un des plus grands paradoxes dans la gestion hospitalière. Dommage que la circulation de l’information médicale, élément clé du fonctionnement d’un établissement hospitalier, ne fasse pas l’objet d’une plus grande attention.

A ce jour, rares sont les établissements qui intègrent la dimension stratégique et les enjeux de cette fonction support. Pourtant, selon Docapost, filiale de la poste spécialisée dans la gestion documentaire, 5 à 8 % du chiffre d’affaires d’une entreprise seraient consacrés à la gestion des documents, un employé consacrerait 400 heures par an à la recherche de documents papier et 25 % des documents seraient mal classés et introuvables.

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Certes, l’hôpital n’est pas une entreprise comme une autre et les comparaisons hâtives peuvent être dangereuses, mais il n’en reste pas moins vrai que la gestion des archives est au cœur du fonctionnement hospitalier. Or, les nombreux témoignages que nous recevons donnent une idée du chemin qu’il reste à parcourir : état des locaux laissant à désirer, mauvaises conditions de conservation des documents (température, humidité…), informatisation réduite à sa plus simple expression, affectation de personnels sans qualification,…

Malgré des conditions d’exercice de leur métier souvent difficiles, les archivistes dans les hôpitaux réalisent au quotidien un travail remarquable qui n’est pas toujours considéré à sa juste valeur. La dénomination même « service d’archives » ne reflète pas la réalité de l’activité de cette fonction et de ses enjeux. Elle ne laisse percevoir qu’une dimension de sa mission : la conservation.

L’autre dimension de la fonction concerne la gestion documentaire, c’est-à-dire la maîtrise du processus qui consiste à fournir aux personnels soignants la bonne information au bon moment, cette dimension de l’activité restant mal connue, insuffisamment optimisée et caractérisée par des coûts diffus et mal maîtrisés. Un service d’archives, selon la taille de l’établissement, peut avoir à gérer plusieurs centaines de mouvements dans une journée, soit des milliers de données médicales clés.

La majorité de ces mouvements, 9 sur 10, concernent des dossiers de moins de 2 ans. Il s’agit donc bien d’information vivante et active. Le rôle d’un service d’archives médicales, est par conséquent double : d’une part, assurer la bonne conservation des documents, d’autre part optimiser leur circulation en prenant en compte les aspects légaux et législatifs. Considérée sous cet angle, la contribution des services d’archives à la qualité de la prise en charge des patients et à leur sécurité devient évidente et devrait être à ce titre mieux reconnue par nos dirigeants. Gérer des archives publiques hospitalières ne revient pas à stocker ou déstocker au gré de la place ou des modes. Il s’agit d’organiser et de préserver un bien précieux à bien des égards, dont la charge requiert des compétences et demande des responsabilités. C’est le vrai sens de la notion de conservation.

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L’obligation de conservation est l’obligation principale dont découle l’ensemble des autres obligations de l’établissement (le transfert de responsabilité, la communication, le lieu de conservation, le respect des délais, les modalités de destruction). Les archives hospitalières et administratives sont au cœur du fonctionnement de l’hôpital. Elles participent directement à la qualité de la prise en charge du patient, à sa sécurité et à une meilleure maîtrise des coûts. Malheureusement, l’institution n’aborde les archives que sous l’angle unique du « stockage-conservation », oubliant qu’il ne s’agit là que d’une étape d’un processus plus global : la gestion documentaire.

En définitive, il est donc temps de changer notre regard sur les archives et de considérer les hommes et les femmes qui y travaillent non plus uniquement comme des « conservateurs » travaillant sous terre, mais comme des professionnels dont le métier est d’optimiser les flux de circulation des documents et de la gouvernance de l’information. Et, nous réclamons l’insertion des Archivistes dans les recrutements du Ministère de la santé et de l’action.







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