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Programme Economique Et Politique Du Verbe

Comment ne pas faire une incursion dans la politique sénégalaise d’où le débat économique est quasi absent, contrairement au débat politique, voire politicien, relayé par une presse encline à susciter la polémique politicienne.

Notre incursion porte sur une invite à plus d’économie, de programmes économiques et moins de politique, adressée aux partis politiques, dont le nombre était estimé à 325 en 2019. La classe politique doit savoir qu’aujourd’hui, le discours politique porte de moins en moins ; ce qui pourrait faire distinguer les uns des autres, ce sont les propositions de programmes à mettre en œuvre sur la durée d’un mandat électif.

Les campagnes électorales ne sont pas les meilleurs moments, ni les lieux les plus propices pour annoncer des mesures économiques à des populations qui auraient tendance à « entendre par la gorge » (électeurs alimentaires) comme on l’entend dire dans une partie du pays. Les programmes, pour autant qu’ils existent, devraient être portés à la connaissance des Sénégalais et débattus publiquement.

Par le passé, des leaders opposaient généralement à cette invite une boutade prêtant à sourire, du genre: « si je dévoile mon programme, mes adversaires à court d’idées vont me copier ». Aujourd’hui, les choses ont à peine changé. Peu de leaders de partis interviennent, en effet, sur les questions économiques. Les élections municipales, législatives et présidentielles sont en perspectives sur les années 2022/2024.

Avant les « présidentielles », nous allons vers des élections municipales, dont l’enjeu devrait être le développement des infrastructures locales et la couverture des besoins essentiels pour le bien-être des populations. Des plans de développement prévisionnels devraient déjà être élaborés et portés à la connaissance des populations pour bien fonder le choix des équipes municipales futures, d’autant qu’il n’y a plus d’ambiguïté sur la personne du maire potentiel qui serait la personnalité en tête de liste des partis ou coalitions en compétition.

Les futurs maires devraient s’engager à associer les populations à l’exercice de la gestion municipale. Jusqu’à présent, en effet, il est très rare, pour ne pas dire exceptionnel, que les citoyens soient individuellement informés du contenu des comptes administratifs annuels, des programmes d’investissements projetés dans les quartiers, ni d’un quelconque compte rendu d’exécution budgétaire. Les contacts avec les services se rapportent fréquemment aux patentes commerciales et, de façon plus désagréable, au paiement d’amendes pour mauvais parking de voiture. Cela, c’est bien sûr valable dans les villes.

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Ailleurs, dans les zones rurales, il y a encore moins de contacts — ne serait-ce que sous forme d’amendes infligées ! — entre les équipes municipales Pas d’invitation aux séances de conseils municipaux, ni de mise à disposition des administrés d’une quelconque information. On est d’accord que les ressources financières municipales sont étroites, faute de paiement comme il se doit des impôts fonciers, des patentes des microentreprises et de leurs frais d’enseignes Il faut également convenir que, pour l’essentiel, les dépenses d’investissement et de fonctionnement sont couvertes par les transferts de l’Etat sous forme de fonds de dotations et d’équipements dont les délais de mise à disposition échappent au contrôle municipal, parce que dépendant des arbitrages du Trésor public, gardienne des fonds.

Mais là où il y a manque d’initiative municipale, c’est du côté de l’appel à la participation citoyenne. Dans le ramassage d’ordures, tous les quartiers devraient être mobilisés et des participations financières demandées.

Pour un service urbain de qualité et avec une communication adaptée à l’endroit des citoyens, les riverains d’un quartier sollicités pourraient répondre positivement. Lorsqu’il y a défaillance des services d’assainissement qui pourrait être préjudiciable à la bonne tenue des quartiers, tout résident serait prêt à apporter sa contribution, pourvu que les bonnes solutions soient trouvées.

Pour cela il faut une politique municipale préventive, centrée sur les besoins des quartiers. A deux années de l’élection présidentielle de 2024, les candidats devraient s’atteler, dès à présent, à affiner leurs propositions de programmes de parti ou de programmes communs de gouvernement, pour ceux-là qui projettent d’aller en alliance avec d’autres formations politiques.

Le parti au pouvoir devrait commencer à faire le bilan exhaustif du PSE, et de sa viabilité, du fait de l’argument avancé de son ébranlement par le COVID, de ses résultats médiocres sur le développement industriel et l’emploi, mais également de la lutte contre la corruption et les détournements épinglés par des institutions de contrôle comme l’IGE et l’OFNAC non encore sanctionnés. Les résultats médiocres de ce dernier office sont d’autant plus médiocres que sa création découle de la volonté politique du président Macky SALL de « promouvoir la probité dans la gestion des affaires publiques ».

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Les alliances politiques pour des élections doivent avoir pour socles des programmes consensuels de gouvernement. Même lorsque ceux-ci ne sont pas réclamés par les électeurs, les futurs élus devraient se faire obligation de « dire » ce qu’ils ont prévu de « faire » une fois élus. Dans la perspective des élections présidentielles de 2024, les programmes des candidats devraient déjà être en librairie. Hormis Ousmane SONKO, nous n’avons pas encore vu de candidats potentiels à la magistrature suprême, proposer un programme de gouvernement.

Du président Macky SALL, au contraire, il n’est pas attendu un programme mais, plutôt, bilan exhaustif du PSE. En effet, pour un plan dont le terme est fixé à 2035, année d’émergence du Sénégal, partager ses réussites et ses échecs avec le pays tout entier à travers ses organisations politiques, syndicales et de la société civile serait une porte ouverte à la pérennisation de ses acquis. C’est pourquoi, instaurer un débat national sur les résultats du PSE, faute de l’avoir soumis au préalable au consensus populaire, est une exigence au regard des ressources financières engagées et des dettes contractées par le pays. Les citoyens sont en demande de confrontation de programmes économiques de ceux qui aspirent à les diriger.

Au-delà de l’évaluation des politiques publiques en cours, les thèmes majeurs sur lesquels les candidats pourraient être attendus tourneraient autour des points suivants : Propositions pour rendre la vie moins chère aux populations (action sur les prix relatifs aux besoins essentiels : eau, électricité, santé, éducation) ; Promotion d’infrastructures sociales adaptées aux besoins (hôpitaux, écoles) Politique pour l’employabilité des jeunes et réformes des programmes d’enseignement et de formation professionnelle ; Protection, promotion et système de financement des PME et TPE ; Grande Agriculture et gestion des ressources en eau ; question essentielle, si l’on sait que l’aménagement des 250 000 hectares de la Vallée pour l’irrigation se heurte au coût abyssal des infrastructures hydrauliques, et que l’OMVS est davantage centrée sur la gestion hydroélectrique dont les retours sont plus substantiels en termes de revenus.

Petite agriculture familiale dont les surfaces exploitées (riz) sont de l’ordre de l’hectare, peu rentables et à l’origine de faillites paysannes et de contentieux bancaires. Développement industriel souverain, et valorisation des ressources du sol et du sous sol.

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Développement des exportations : Compétitivité et coût des facteurs ; compétitivité et taux de change ; Intégration économique et développement du commerce à l’échelle de la sous-région. La question de la monnaie est en débat partout dans la Zone franc A ce stade, aucune proposition de réforme ou d’abandon n’émane des leaders politiques, hormis Sonko et Macky Sall, l’un prônant la création d’une monnaie nationale et l’autre considérant que le FCFA est une très bonne monnaie. Les “prétendants au trône” devraient se prononcer sur les questions économiques essentielles afin d’être fin prêts le moment venu, pour mettre en œuvre des solutions alternatives et non s’inscrire dans une alternance de personnes. Auquel cas, les changements attendus dépendraient des seules qualités intrinsèque du chef élu, à charge pour lui d’opérer les ruptures nécessaires ou alors de dérouler dans le droit fil de son prédécesseur, le tout dépendant de son bon vouloir.

Le Sénégal a connu en 2008 l’expérience des Assises Nationales organisées par l’opposition de l’époque aujourd’hui au pouvoir. Cette initiative découlait, en partie, de l’absence de cette opposition au niveau des instances officielles de débat des politiques publiques. Ces Assises aboutirent, avec l’aide des experts de la société civile, à l’élaboration d’un programme de gouvernement centré sur des mesures essentielles portant, entre autres, sur la réforme du système judiciaire, la lutte contre la corruption, la réduction voire la suppression de la dépendance économique et financière. Les conclusions de ces Assises n’étant « ni la Bible, ni le Coran » encore moins la Thora, selon le président Macky Sall, ne furent donc pas appliquées.

Néanmoins, ce cénacle a pu indiquer le chemin d’une gouvernance préparée, même si on pouvait ne pas être d’accord sur certains aspects particuliers. Aujourd’hui, ma conviction est que le mythe de l’homme providentiel en matière de gestion d’un pays est en lente déperdition. La participation populaire, le contrôle et la reddition des comptes, de plus en plus exigés par les populations, deviennent indispensables à la bonne conduite des affaires des pays. De cette aspiration profonde qui émerge des discours citoyens, on peut valablement considérer que l’exercice du pouvoir tiendra plus du sacerdoce que la satisfaction d’une pulsion personnelle.

Abdoul Aly Kane







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