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Changer Le Fleuve Qui Se Jette À La Mer

Changer Le Fleuve Qui Se Jette À La Mer

Si nous voulons être ce à quoi nous aspirons être, à savoir une grande nation, nous devons apprendre à agir comme ces grands hommes : quand nous faisons une erreur, nous devons nous en rendre compte, une fois constatée, il faudra l’admettre en toute transparence, et une fois admise, il faut la corriger. Tel est le processus cognitif qui habite les grands hommes.

Faire exploiter notre zircon par une société « nationale « dans laquelle nous ne détenons qu’une infime partie est une faute. Exporter toute « notre » production vers l’Europe, sans aucune transformation, est encore une plus grosse faute, car, c’est mettre une croix sur les jobs que nous aurions pu créer sur place. Ne répétons pas avec le zircon, les erreurs du pétrole.

Petit fleuve, arrêtons de charrier ce que nous avons de plus profond dans nos entrailles, notre pétrole, notre gaz, notre or et notre zircon dans les mers que représentent la France, la Chine, la Turquie et autres. Certes la vocation d’un fleuve, est de se jeter dans la mer, mais nous pouvons au préalable transformer ce fleuve.*

Si nous rêvons d’être une grande nation, nous devons être conscients du biais de normalité. Celui qui conduit à nier ou à minimiser les avertissements que représente le danger soulevé par les évènements récents de violence physique, observée d’abord à l’Assemblée nationale, puis plus récemment, en Casamance.

Ne sous-estimons pas la probabilité d’une catastrophe que serait un affrontement généralisé, vers lequel mènent inéluctablement tous ces îlots de violence, fomentés par des sans-grades, dans le seul but de plaire au prince.

Un malheur ne vient jamais seul. Bien qu’un pas glissant représente peu, il peut être suivi, si on ne prend garde, d’une chute brutale. C’est le « tata moro moro »* qui vous enverra, sans crier gare, valdinguer dans la boue avant que vous ne buviez la tasse. Ce danger nous guette !

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Il nous faut, si nous voulons être un grand pays, arrêter les contestations molles et les appels au calme lénifiants, et condamner avec vigueur le camp, quel qu’il soit, d’où émanent ces violences.

Le président ne doit pas accepter que dans son camp, siègent des fauteurs de trouble à l’ordre public qui, une fois leur forfait accompli, vont et viennent comme de si de rien n’était. Il a la responsabilité de la paix civile pour tous au Sénégal. Benoit Sambou a certes eu le courage de dénoncer son camarade de parti Doudou Ka, martelant qu’aucun quartier, qu’aucune rue, n’était interdit de circulation, à quiconque dans une République. D’aucuns ont vu sa remontrance, comme une façon habile de profiter de la faute de son camarade, pour tirer la couverture à lui : mon « adversaire-ami » Doudou Ka n’est-il pas plus dangereux que mon « adversaire-ennemi » Ousmane Sonko ? Il faut, de toute façon vaincre le premier, avant d’affronter le second. Autant alors, charger au maximum son « ami ». L’attaque fut d’autant plus pernicieuse qu’il l’a retardée, éludant à plusieurs reprises la question du journaliste qui l’interviewait. Ce dernier dut user de toute sa pugnacité et de multiples relances, pour lui faire enfin cracher cette condamnation. « Oui, cette pratique de violence dans son propre camp ne sert pas le chef de l’État ! », finira-t-il par asséner.

Comme Jaures*, nous lançons un appel aux vivants pour qu’ils se défendent contre le monstre qui apparaît à l’horizon.

Pour endiguer cette spirale de violence, les propos oniriques des uns et des autres ne suffiront pas. L’opportunité est donnée au chef de l’État de raisonner ses troupes en faute et de sévir au demeurant. Il lui suffirait pourtant pour rétablir l’ordre, d’appliquer le même principe de fermeté dont il fait preuve, vis-à-vis de ceux de son camp qui parlent du troisième mandat.

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Pour l’heure, sa pratique de laissez-faire encourage ses partisans benêts qui rivalisent de maladresses pour se distinguer et gagner sa sympathie. On a encore présente à l’esprit, l’implication « pieds nickelés » des gens de son parti dans l’affaire « Sweet beauty », et la sortie malencontreuse du député à la machette. Voilà maintenant que pointe un autre scandale, les attaques des nervis de son camp contre son principal adversaire à Ziguinchor.

Avec les locales en vue, les foires d’empoigne vont se multiplier et devenir plus rugueuses. Pour l’heure, on assiste à des batailles de positionnement. Les revirements se font déjà jour : « Futa Taampi » s’est mué, en un claquement de liasses, en « Futa Welli » et « Podor va mal », par on ne sait quel effet magique, ne va plus mal.

Tout change alors que rien ne change. Seules les attaques de rustiques, de présomptueux, et autres impertinents portant haut la voix fusent, donnant l’impression que les choses changent.

Si nous voulons être un grand pays, les agresseurs de notre démocratie, amateurs d’algarades incessantes sur les plateaux de télévision, à l’Assemblée et ailleurs, doivent méditer ces vers de B. Brecht* :

 Qui lutte doit savoir perdre !

Qui cherche querelle s’expose au danger !

Qui professe la violence

N’a pas le droit d’accuser la violence

Si nous voulons être un grand pays, vous autres observateurs, qui pensez que vous n’êtes pas concernés, que ce ne serait qu’une affaire de politiciens, vous qui ne comprenez pas notre colère, nous les révoltés, nous vous dirons :

Ah mes amis

Vous qui êtes à l’abri

Pourquoi cette hostilité ? Sommes-nous

 Vos ennemis, nous qui sommes les ennemis de l’injustice ?

Sachez que nous ne laisserons pas vos consciences tranquilles, nous insisterons pour que la torture soit complète :

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Quand ceux qui luttent contre l’injustice sont vaincus

L’injustice passera t –elle pour justice ?

Assurément non. En tout cas pas dans une grande nation !

Pour être une grande nation, il faut savoir s’émanciper, prendre notre propre liberté, car personne ne nous la donnera. Surtout pas la France, cette vieille gaupe, naguère belle, délaissée et humiliée aujourd’hui par ses alliés. Pourquoi notre regard se tourne-t-il encore vers elle ? Pourquoi ?

Macron a inventé, avec son sommet de Montpellier, un genre nouveau dans une vieille françafrique. Il a dorénavant, choisi de marcher derrière une certaine société civile africaine, comme naguère, le colon avait marché derrière le soldat et le missionnaire. Mais personne n’est dupe, nous avons compris l’étrange palimpseste qu’est cette nouvelle françafrique. La France ne peut plus jeter ses filets ailleurs dans le monde. Elle n’a plus que l’Afrique comme proie. Elle le dit elle-même : « l’Afrique est l’avenir de la France ». À nous de refuser d’être la proie, d’être notre propre avenir, d’assurer notre liberté en surfant favorablement sur la multiplicité des appétits qui nous guettent.*

C’est cela qui changera le fleuve et fera de nous une grande nation !

Dr. Tidiane Sow est coach en Communication politique.

tsow@seneplus.com

Références :

– Lao-Tseu : Tao Te King

– « Tata moro moro « : Pente de glissade recouverte d’argile au bord du fleuve servant de toboggan

– J. Jaurès : « J’appelle les vivants » Discours du congrès de Bale, 1912

– « Futa Taampi » : le Fouta est fatigué

– « Futa Welli » : Il fait bon de vivre au Fouta

– B. Brecht : Nos défaites ne prouvent rien

– Hommage à J. Jaurès : H. Brisson : Antagonisme anglo-allemand







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