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De La ProblÉmatique De La RÉmunÉration Au SÉnÉgal

« Donnez à l’employé son salaire avant que sa sueur ne sèche ! ». Le Prophète Mohammad PSL. « Toute peine mérite salaire » Evangile de Saint Luc. « Tout salaire mérite travail » Yvon GATTAZ (chef d’entreprise). En contrepartie de la contribution à l’exercice de missions de service public pour satisfaire l’intérêt général, les agents fonctionnaires de l’Etat perçoivent un traitement ou une solde. Quant aux agents non fonctionnaires de l’Etat qui s’investissent aussi pour le compte du service public ainsi que les travailleurs du privé qui participent à la production, à la vente de biens et à la fourniture de services, ils perçoivent un salaire.

Au-delà de l’usage de ces deux vocables renvoyant tous à la notion de rémunération, la différence entre les finalités de ces secteurs justifie aussi : d’une part, que les traitements des agents fonctionnaires de l’Etat et les salaires des agents fonctionnaires de l’Etat soient fixés intégralement de manière unilatérale par la loi et les règlements ; d’autre part, que les salaires minimaux du secteur privé soient déterminés d’un commun accord entre les organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs de la même branche d’activité. Toutefois, arguant de la cherté du coût de la vie ou excipant de disparités dans le traitement entre les différents corps de la fonction publique, les syndicats regroupant les agents de l’Etat ont réussi au fil du temps à développer un rapport de forces qui a fait perdre à l’Etat employeur l’initiative exclusive de la revalorisation généralisée des rémunérations dans le secteur public.

Les grades des fonctionnaires sont composés d’échelons fixés de manière unilatérale par voie réglementaire ; chaque échelon correspondant à un indice. Cet indice multiplié par le point indiciaire permet de déterminer le traitement ou solde indiciaire. Présentement, à la faveur de la revalorisation sans précédent dans le sens d’une meilleure équité des rémunérations au profit des personnels de l’enseignement, de la santé, des forces de défense et de sécurité et des autres agents publics non constitués en syndicats qui a pris effet à compter du 1er mai 2022, le point indiciaire a une valeur égale à 56,43 FCFA au Sénégal.

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Au traitement indiciaire, s’ajoutent notamment : d’une part, à tous les agents de l’Etat, l’indemnité de résidence, le complément spécial de solde, les suppléments pour charge de famille ; d’autre part, selon le corps auquel appartient l’agent ou la fonction qu’il occupe, des indemnités liées au corps, justifiées par des sujétions, des responsabilités ou des fonctions occupées ainsi que des primes.

Dans le secteur privé, la plupart des branches d’activité sont régies par des conventions collectives sectorielles. Des conventions collectives à propos desquelles « Le Président de la République souligne, en particulier, l’urgence de finaliser, d’une part, l’actualisation des conventions collectives et, d’autre part, la conclusion des conventions dans les secteurs émergents et/ou dépourvus de cadre de pilotage consensuel des relations professionnelles » Conseil des Ministres du 4 mai 2022. En effet, les parties prenantes à la négociation collective au niveau de la plupart branches d’activités n’ont jusqu’ici pas usé pleinement de leurs prérogatives pour procéder régulièrement à la réactualisation des cadres conventionnels de relations professionnelles existants ou à la conclusion dans les secteurs qui n’en disposent pas.

A chaque convention collective est adossée une annexe de classification des emplois. Ces emplois correspondent à des catégories professionnelles dont chacune renvoie à un salaire mensuel basé sur une rémunération horaire dont le montant est déterminé d’un commun accord entre les partenaires sociaux travailleurs et employeurs à la suite de négociations. Les barèmes de salaire catégoriels font l’objet de revalorisations régulières en fonction de l’évolution du coût de la vie. La dernière revalorisation des salaires dans le secteur privé date du 30 décembre 2020.

Au Sénégal, la pratique consiste à procéder à une augmentation généralisée des salaires du secteur privé avec des taux uniformes qui s’appliquent à tous les secteurs d’activité et qui ne peuvent varier qu’en fonction des catégories. Une pratique qui, nonobstant la modicité des salaires catégoriels fixés certes tempérée par la négociation entre les parties pouvant ouvrir droit à un sursalaire au profit des employés, présente des limites.

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En effet, par cette pratique, on peut : soit, causer un défaut de compétitivité dans certaines branches d’activités du fait de la fixation généralisée des salaires minima avec des taux uniformes sans tenir compte de leurs niveaux de productivité ; soit léser des travailleurs des branches d’activité les plus prospères qui peuvent supporter des augmentations de salaire plus conséquentes.

Le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) et le salaire minimum agricole garanti (SMAG) ne servent pas donc pas de bases pour la fixation des salaires au Sénégal car les salaires minimaux catégoriels les plus bas garantissent des montants qui leur sont supérieurs.

Le SMIG, équivalant à 303, 808 francs CFA depuis le 1er décembre 2019, permet de déterminer le montant de l’indemnité de panier qui est attribuée au travailleur qui effectue au moins six heures de nuit ou dix heures ininterrompues ou encore trois heures en plus de l’horaire normal fixé à huit heures par jour et pour le calcul de la valeur de remboursement du logement fourni par l’employeur.

Cette indemnité de panier est égale à trois (3) fois le SMIG ; les heures de nuit étant situées entre 22 heures et 5 heures. Depuis la deuxième Conférence sociale qui a porté sur le thème « La réforme des retraites au Sénégal », le SMIG sert aussi d’étalon à la fixation de la pension minimale servie aux retraités par l’Institution de Prévoyance des Retraites du Sénégal (IPRES). Quant au SMAG, il sert entre autres à calculer la valeur de remboursement de la ration alimentaire fournie par l’employeur.

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De toute évidence, des traitements équitables et des salaires décents demeureront des attentes des travailleuses et des travailleurs du monde. Toutefois, il est clair que le travail ainsi que les salaires ne peuvent être décents dans un pays si son économie est incapable de générer suffisamment d’emplois pour toutes les personnes en âge de travailler. Car, même si les droits au travail sont garantis avec notamment une administration du travail dotée de tous les moyens, les personnes en âge de travailler seront contraintes d’accepter n’importe quelle rémunération en contrepartie de n’importe quel travail. Par ailleurs, dans nos pays caractérisés par une prépondérance de l’économie informelle, il est aussi impératif de développer des stratégies d’extension de la protection sociale adaptées à chaque famille d’acteurs de l’économie informelle.

Enfin, la promotion d’un dialogue social de qualité entre les mandants tripartites est nécessaire pour permettre la création massive d’emplois par les employeurs, le respect par ces derniers des droits des travailleurs et l’adhésion des acteurs de l’économie informelle aux politiques devant aboutir à la formalisation de leurs unités, seule garante de leur accès durable à la protection sociale. Il s’agit là du sens et de la portée du concept de « travail décent »

Ce concept introduit et développé par l’Organisation internationale du Travail (OIT), qui tient du 27 mai au 11 juin 2022 sa 110ème Conférence internationale du Travail (CIT), a abouti à la création de l’Agenda pour le travail décent et à ses quatre piliers indissociables : la création d’emplois et de moyens de subsistance durables ; la garantie des droits au travail ; l’extension de la protection sociale ; la promotion du dialogue social.

Oumar FALL

Inspecteur du Travail et de la Sécurité sociale,

Secrétaire exécutif du Haut Conseil du Dialogue social

Email : oumarfall8@yahoo.fr







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