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Ousmane Sonko : Imprudences Et Maladresses « Guillotinantes » D’un Phenomene

Ousmane SONKO est devenu indubitablement un phénomène de la vie politique sénégalaise. Entré brutalement en politique par des révélations fracassantes, cet ancien fonctionnaire radié de la fonction publique pour des fautes graves liées au manquement à l’obligation de réserve, est une réalité politique tangible voire même incontournable. Il suscite beaucoup d’espoirs pour une bonne partie de la population, surtout les jeunes. Ces derniers, souvent violents et fanatiques, pour défendre le fameux « projet » vanté urbi et orbi, n’hésitent pas à s’immoler pour le « guide ». Les événements de mars 2021 – dont une partie de la responsabilité peut lui être imputée – qui ont secoué le régime de Macky SALL sont des illustrations patentes à cet effet. 14 pertes en vie humaine, importantes pertes matérielles et immatérielles…

Cette déflagration de son succès s’explique en partie, à bien des égards, par un discours radical qui a néanmoins été dilué au prorata de son évolution politique. Cette volte-face n’a jamais été profondément analysée : pourquoi le discours et la posture de SONKO vis-à-vis de la France se sont chambardés au fil du temps ? Y a-t-il d’autres réalités découvertes ? Le discours extrémiste et autarcique contre la France était-il une stratégie politique doucereuse ? Est-ce un aveu d’ignorance et d’inexpérience ? Bref… Le temps est le meilleur des juges !

Néanmoins, malgré ce succès retentissant et sans précédant, le maire de Ziguinchor a eu un parcours politique mâtiné d’imprudences et de maladresses aux conséquences politiques et sociales souvent terribles. Qui plus est, il y a, chez lui, une inculture de prise de responsabilité. Le journaliste Antoine MOÏSE a récemment souligné, dans un article publié le 08 mai 2023 sur Seneplus, « cette inquiétante absence de rigueur » du leader de Pastef.

I- Une rocambolesque affaire de viol

Cette affaire de viol, qui ne finit d’alimenter les débats publics, a fortement secoué le Sénégal. En février 2021, la masseuse Adji SARR, une jeune femme qui s’est retrouvée à Dakar par l’exode rural, a porté plainte contre le leader de Pastef pour viol. L’affaire a suscité plusieurs positions, parfois doucereuses et partisanes, et a été à l’origine, comme à l’accoutumée, de bravades dangereuses des pro-Sonko. Les institutions de la République ont failli s’écrouler emportant ainsi avec elles le contrat social sénégalais. Les soubresauts populaires qui ont été induits par ce fait social devenu illico presto politique ont été à l’origine d’innombrables pertes matérielles et immatérielles. Et plusieurs victimes ont payé les pots cassés.

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Nous devons à la vérité de dire que les réelles questions qui sous-tendent cette affaire n’ont jamais été posées. La terreur collective qu’exerce ses « cerbères » sur l’opinion publique peut, dans une certaine mesure, expliquer cette cécité intellectuelle. Nous avons été pris d’assaut par les fourmillements des diatribes contre le régime ; l’accusant à tort ou à raison d’avoir peaufiné un guet-apens pour éliminer un adversaire politique. Voire !

Tout semble se dérouler comme dans un tintamarre où nous peinons à prendre du recul, en dehors de nos appartenances politiques et avec une témérité assumée de faire face aux meutes auto-proclamées, pour analyser, en toute lucidité, les arcanes de cette affaire.

La presse a aussi courbé l’échine devant les insultes et les insanités des « escadrons de l’invective. » Les analyses profondes ont cruellement manqué. Le superficiel a toujours pris le dessus sur le substantiel. C’est là où l’analyse courageuse, mais véridique, du journaliste essayiste-politique Cheikh Yérim SECK, à qui il faut reconnaître son patriotisme et son sens élevé de professionnalisme, prend tout son sens. Le journaliste-écrivain s’est pertinemment interrogé : « Mais, si ses ennemis ont ficelé son cas ou tenter de le corser, l’ont-ils, de force, traîné jusqu’à ce salon de massage aux allures de maison de passe, un soir de couvre-feu ? Ne doit-on pas, si on veut parler vrai, lui dire de regarder en face de sa propre responsabilité pour être sorti masqué, sans chauffeur ni garde du corps, une nuit de couvre-feu, pour se retrouver dans un endroit où il n’y a que du massage de plaisance ? L’argument de la douleur lombaire ne trompe personne. Le pays pullule de kinésithérapeutes qu’il aurait pu consulter, même en urgence sous le couvre-feu. Les médecins étaient autorisés à circuler, tout comme les malades. Se rendre à Sweet Seauty dans ces conditions troubles n’est toutefois pas une infraction pénale. Tout comme y avoir une relation sexuelle avec une masseuse majeure et consentante. De cette sortie nocturne, toutefois, est partie l’une des pires convulsions de notre histoire politique récente. » (Macky SALL face à l’histoire/ Passage sous scanner d’un pouvoir africain, chap.16, p.180)

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Des réponses justes à cette interrogation extrêmement pertinente pourraient éclairer l’opinion publique sur les responsabilités de tous les acteurs qui ont concouru à la dégénération de cette affaire, coûtant ainsi la vie à plusieurs innocents. Ils ne sont pas des martyrs, ils sont des victimes de quelques hommes obnubilés par leur fin. En outre, les manipulations et les affabulations pourront retrouver, à la consternation générale et salvatrice, leur Patriarche. Discutons sereinement !

I- Une tragique affaire de diffamation

Le leader de Pastef est hypothétiquement écarté de la course pour la présidentielle

(en attendant le pourvoi en cassation) suite à sa condamnation en appel dans l’affaire de diffamation qui l’a opposé au ministre du tourisme, Mame Mbaye NIANG. Cette affaire a aussi, comme celle qui l’a précédée, causé beaucoup d’instabilités au pays. Des manifestations ont éclaté avec, comme d’habitude, leur lot de malheurs. Encore une fois, à maintes reprises, c’est désormais une routine, le leader de Pastef s’est embourbé tout seul dans une situation très inconfortable. La léthargie sur les réelles causes de cette affaire judiciaire est inquiétante, mais pas surprenante : la terreur collective engourdit la rationalité. 

Le journaliste Antoine MOÏSE s’est extirpé de cette résignation intellectuelle et a analysé l’affaire en profondeur. L’attitude preuse et professionnelle du journaliste est à saluer avec des dithyrambes lorsqu’il écrit ces lignes factuelles et inébranlables : « À la base, il faut parler de la rigueur incomplète dont a fait preuve le chef de file de l’opposition en confondant les rapports IGE et IGF. On parlerait d’erreur, s’il n’aspirait pas à occuper la plus haute charge de l’État. À ce point-ci, une équipe devrait travailler à lui éviter ce genre d’erreur, en lui fournissant un discours ou des éléments de langage. Donc c’est un manque de rigueur, car il connaît la différence entre ces deux organes de l’État, il est inspecteur des impôts. Les conséquences économiques, sécuritaires et judiciaires de ce manque de rigueur sont déjà très élevées et continuent de l’être. » (Antoine MOÏSE, Cette inquiétante absence de rigueur, Seneplus, 08/05/2023).

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Dès lors, s’il existe un « cabale judiciaire » contre le chef de file déclaré de l’opposition, c’est lui-même qui a été, à vrai dire, l’instigateur principal. Certains de ses partisans, peu critiques, affirment, mezza-voce, de manière hypocrite, que leur leader est le principal responsable et coupable du procès qui peut le mener directement vers la guillotine tout en continuant d’élever des tirades sur un complot d’État. Aporétique ! 

Il faut qu’ils apprennent à assumer, quoi qu’il en soit, les responsabilités de leurs incartades politiques. C’est une marque de grandeur. Qui plus est, comme le soutient Max WEBER, l’homme politique doit indispensablement avoir une culture de prise de responsabilité.

Somme toute, Ousmane SONKO, qui a suscité beaucoup d’espoirs et d’attentes pour un peuple assez mutilé par sa classe politique, a commis beaucoup de maladresses et d’imprudences tout au long de son cheminement politique. Il s’est laissé tremper, par imprudences et inexpérience, dans des situations inconfortables, généralement mortifères pour un opposant de son calibre.







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