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La 5eme Republique : Trois Mois De Grossesse Et Un Enfant Deja Si Attendu !

Il faut neuf mois pour faire un enfant ! Le décompte de la grossesse est à trois mois pour la nouvelle mariée. Si nous ne voulons pas de prématuré avec peu de chances de survie, laissons la 5ème République, cette épouse si chantée et si attendue, achever ce cycle régulier à ne pas brusquer et qui donne la vie !

Le navire est encore ancré dans les dunes, mais il est tiré par l’appel de la mer et bientôt la haute mer ! Telle pourrait se présenter encore, en ce seuil de juillet 2024, la photographie de notre pays avec l’arrivée -depuis trois mois-, d’une équipe plébiscitée par les urnes, espoir d’une rupture porteuse de dynamiques nouvelles. Mais toujours garder le meilleur de l’héritage. Se souvenir de ce qui a été déjà bâti. Se souvenir des réussites. Se souvenir des échecs et des tragédies. Se souvenir des victoires. Etre grand pour se souvenir à la fois du passé et du futur, et de ce qu’on laissera soi-même à son Peuple et qui survivra à l’oubli. L’oubli est le plus ténébreux des tombeaux !

Clore le débat et saluer une fois pour toutes une démocratie inflexible qui a encore gouverné une alternance que l’on croyait assassinée. Il est temps, dans cet étrange pays, que l’on arrête de déshabiller et d’habiller à longueur d’années une démocratie plus mûre et plus avancée que toutes. Qu’on la laisse tranquille ! Elle a donné de belles épouses et des enfants inattendus à nombre de ceux qui croyaient qu’elle était stérile, qu’elle creusait même une tombe aux opposants ! Elle les a plutôt conduits sous les lambris du Palais !

Travaillez Monsieur le Président, comme si c’était demain matin, dès l’aube, la prochaine élection présidentielle, l’appel aux urnes des Sénégalais ! Vous n’avez pas pour l’heure le dos tourné au soleil ! Votre Peuple est touché par ce que vous incarnez : l’humilité, la politesse, l’écoute, le respect servi à tous, la foi. Ajoutez-y la fermeté et l’autorité ! La quête du pouvoir, vous l’avez apprise déjà au bout de 90 jours, n’est pas la gestion du pouvoir. Mais vous êtes un Président qui tranquillise et personne ne sait pourquoi ce sentiment nous habite si fort, malgré le doute des uns et l’adhésion du plus grand nombre !

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Si notre jeunesse, une certaine jeunesse, tous ne sont pas dans la révolte et la rébellion, pouvait déjà vous emprunter ces belles valeurs que vous portez, les adultes compris, car ils savent être pires que les jeunes, votre combat pour le développement serait moins lourd ! Il n’existe pas de pays sous-développés. Il n’existe que des hommes et des femmes sous-développées, c’està-dire sans éducation et sans culture.

Tout dans ce pays est à réinventer ! Cela ne peut être le combat d’un seul homme, et vous n’êtes qu’un homme, mais quel homme vous êtes déjà face à nos valeurs les plus chantées ! Merci d’être allé embrasser le Président Abdou Diouf ! En l’embrassant, vous avez embrassé Senghor, Wade, Macky. Vous avez conquis tous les cœurs des Sénégalais de foi et de mesure. Vous avez montré le chemin ! Mais restez vous-même !

Les prédécesseurs de l’apaisant et tranquille Président Diomaye Faye n’ont pas tout réussi, mais ils n’ont pas non plus échoué en tout. Ce n’est pas vrai qu’ils n’ont laissé que pipette, verroterie, pacotille. Un seul, un grand cœur qui a beaucoup bâti, lui aussi porté jadis par tout un Peuple qui voulait enfin le changement, a hélas atomisé la face de notre société, fait limer l’or de nos valeurs. Comme une pomme de terre pourrie, il a laissé faisander jusqu’à l’os nos valeurs primordiales, décorant à tour de bras «Grand-Croix de l’Ordre du Mérite» la plus vile des médiocrités, le plus infect des immoraux, décrétant l’enrichissement illicite, le copinage, la complicité, le cigare pour les seuls partisans, la vanité, l’ignorance puante, alors que luimême était un bel et puissant esprit. Un paradoxe et un historique gâchis ! Son héritage avait déjà installé une innommable et irrattrapable blessure ! Ce fut là, avec lui, le tournant d’une société sénégalaise qui voyait ses valeurs les plus nobles être égorgées sous ses yeux. Nous en payons encore aujourd’hui le prix !

Le Président Diomaye Faye, quant à lui, hérite d’un chantier titanesque qui n’est pas un cadeau : réinventer un nouveau Sénégalais en réincarnant les valeurs premières d’hier ! Il n’y a et il n’y aura jamais de plus précieux que nos valeurs de vie, de noblesse et de grandeur en société. Senghor, encore lui, avait tout dit et tout enseigné : enracinement, d’abord dans ce que nous possédons de plus beau et qui nous différencie des autres !

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Désormais, jusqu’en 2028, dans cinq ans -déjà demain-, Monsieur le Président, chaque jour portera votre nom. En effet, ce que vous tenez «dans le creux de votre main» est plus grand que vous-même et votre main. Cela s’appelle d’un mot sacré : l’Etat ! Ne vous agenouillez nulle part ! Ne cédez rien ! N’ayez soif que d’ordre, de discipline, de patriotisme et de civisme, de paix, d’équité, d’écoute, de justice et de pain pour votre Peuple ! Et rappelez-vous toujours que chaque matin, votre Peuple tend l’oreille et ouvre grand ses yeux rougis : «Il vaut mieux voir une fois que d’entendre mille fois.» Il attend !

Des vagues crémeuses et tolérantes sont prêtes pour que le navire trop ne tangue ! Puisse le poids de notre espérance ne pas être déçu ! Juste laisser s’achever la saison de fin de grossesse ! De grandes et poissonneuses pêches nous attendent ! Voilà ce que nous souhaitons aux nouveaux bergers de la République ! Mais il n’y a pas de berger sans loup et sans hyène ! Ce sont ces derniers qui font les bons bergers !

Pour le navire qui descend les dunes vers la mer pour appareiller, prions pour les officiers de bord. Soyons tous des matelots émérites. Cap et vigilance de tous les regards ! Attention aux récifs ! Pas d’escale ! Une boussole pour un seul Est, car c’est de là que le soleil se lève, et il doit se lever sans jamais se coucher pour nous. Ni Ouest, ni Nord, ni Sud. Droit vers le seul horizon de pourpre et d’or où nos fronts supplient La Source de toute Lumière pour être vainqueurs !

Si un seul jour, un seul, on pouvait se réveiller dans ce pays si beau mais si bavard et si fatigué, et n’entendre nulle part, ni dans le vent, ni dans la criée des charretiers, ni dans les maisons, ni dans les rues, ni dans les bureaux, ni dans les chantiers, ni dans les champs, ni dans les transports, ni dans les radios et télévisions, ni dans les mosquées et églises, ni dans les marchés et étals, ni dans aucun smartphone, les mots : politique et politicien, ce pays serait métamorphosé et toutes les maladies guéries, toutes les angoisses éteintes, tous les espoirs permis !

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Allez donc apprendre et lire le parcours de vie du juge Kéba Mbaye qui, jeune garçon, à Kaolack, faute d’électricité, apprenait ses leçons sous les lampadaires, dans la rue. Son papa, qui aimait les chevaux, voulait en faire un palefrenier. Sa maman restera une longue journée assise, attendant le directeur d’école pour faire inscrire son fils au CM2. C’est cet enfant qui deviendra le confident le plus aimé de Senghor. Il fut homme d’Etat, président de la Cour suprême du Sénégal, président du Conseil constitutionnel du Sénégal, vice-président de la Cour internationale de Justice de la Haye, vice-président du Cio, fondateur du Tribunal arbitral du sport. Il demeure la légende la plus haute et la plus admirable de l’histoire de la Justice de notre République ! Méditons cette vie pour bâtir notre propre vie !

Laissons le président de la République gouverner ! Que chaque Sénégalaise, Sénégalais soit son propre isoloir. Son propre art. Son propre chemin. Le chemin de sa propre vie, avant celle que les politiciens et les pouvoirs publics lui promettent, lui inventent. «Si tous nous étions assis sur les rails, les trains seraient-ils partis ?» Alors, levons-nous, et à chacun sa propre truelle vers son propre chantier ! Que vive ce pays plus beau que nous !

Anecdote : un ami : «Pourquoi donc vous écrivez autant dans un pays desséché où personne ne lit, où la presse est chauve, où les politiques occupent toute la place avec leur verbiage qui n’en finit jamais ?» Je réponds : « J’écris pour ne pas mourir. Je lis pour ne pas mourir. C’est le chant de la mort à mes oreilles, chaque petit matin au réveil. Alors, c’est toujours l’encre et la page des livres qui précèdent le café ! Et je veux encore vivre et chanter mes amours et mon pays chéri. C’est une grâce du Seigneur que je mesure et que je loue. Le grand poète palestinien Mohamed Darwich écrivait bien ceci : «Le seul endroit où je peux me reposer, c’est le langage.» Moi aussi.

Ne nous lassons pas de nous parler avec respect, d’interpeller nos gouvernants vers la voie de la paix. Elle est l’unique médiatrice vers le développement.

Amadou Lamine SALL

Poète Lauréat des Grands Prix de l’Académie française







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