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Confusion Dans La Typologie Des Cas De Contamination Au Covid-19 (dr. Abdourahmane Ba)

Notre pays qui venait d’enregistrer son deuxième cas de COVID-19, appelés « cas importés », avait pris la décision de fermer ses frontières terrestres, maritimes et aériennes au reste du monde à partir du 20 Mars 2020 (retenez très bien, 03-20-2020).

Au même moment une première typologie des cas de contamination apparaissait. Les cas de contamination qui ont contracté le virus à l’étranger avant d’entrer au Sénégal étaient appelés « cas importés ». Tous ceux qui ont attrapé le virus à partir des « cas importés » étaient dans la deuxième catégorie appelée « cas contacts ». Une semaine plus tard vers fin mars 2020, lorsque certains « cas contacts » ont ont été testés positifs, leurs familles et proches ont été isolés et intégrés toujours dans le lot de « cas contacts » potentiels.

Le 30 mars 2020, Dakar enregistre un premier cas dont l’origine de la contamination est inconnue. Ce cas a été tout de suite qualifié de « cas communautaire » par le comité scientifique du Ministère en charge de la santé. Dans une interview récente suite à la présentation du bilan des cas, un expert du Ministère interpellé par un journaliste sur la définition de « cas communautaires », a répondu: « un cas communautaire est un cas dont on ne peut déterminer l’origine de la contamination. »

Ce qu’on ne sait pas, c’est que le journaliste venait de poser la plus importante question statistique dans la typologie des cas de contamination au Sénégal. J’avoue que j’ai été séduit par la question car moi-même j’avais commencé à réfléchir sur une potentielle confusion de typologie qui pourrait déboucher sur de mauvaises decisions et mesures de lutte contre la propagation du COVID-19. Une erreur qui nous mènerait à minimiser les risques auxquels nous faisons face devant cette pandémie.

Il faut dire tout de suite que l’origine de la contamination est difficile à déterminer dans le cas de COVID-19. C’est un virus qui voyage par air, terre et mer. Il se pose sur tous les types de matériaux et y survit pour des durées variables. Il peut se cacher et se propager à travers d’individus porteurs sains, même contaminés dans les minutes précédentes.

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Ainsi, la typologie utilisée dans le cadre du virus Ebola ne peut plus s’appliquer. La contamination par virus Ebola qui suit un spectre arithmétique est traçable beaucoup plus facilement. Ainsi, se mettre dans une dynamique de traçage type virus Ebola nous poussera certainement à utiliser un paradigme obsolète pour comprendre la diffusion de COVID-19.

Des recherches récentes ont démontré que même les systèmes de traçage à venir qui vont utiliser les smartphones, le Bluetooth ou autres procédés électroniques, seront incapables de tracer et détecter toutes les possibilités de contamination et de diffusion. A fortiori, les types de traçage virus Ebola à spectre de diffusion arithmétique actuellement en vigueur dans notre pays sont tout à fait obsolètes et anachroniques.

Dès l’entrée des deux premiers cas au Sénégal vers mi-mars 2020, tous les cas enregistrés sont par definition des « cas communautaires » selon l’acception des experts du Ministre en charge de la santé, si « cas communautaire » signifie cas dont l’origine de la contamination est indéterminée.

Tous les passagers dans le même avion que les deux premiers « cas importés » pouvaient être contaminés et pouvaient contaminer d’autres dans le même avion sans qu’on le sache. Ainsi, dans les avions qui ont transporté les deux premiers « cas importés », il pouvait y avoir des cas dont l’origine de la contamination est inconnue. Nous voilà donc avec des potentiels premiers « cas communautaires » avant même que l’avion des premiers « cas importés » ne se pose à l’AIBD. En conclusion, il y aurait eu des « cas communautaires » avant même qu’on ait commencé à décompter les premiers « cas importés ».

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Quinze jours après la fermeture de toutes nos frontières, il est impertinent de distinguer « cas contacts » et « cas communautaires » dans la diffusion du COVID-19 au Sénégal. Pour tous les cas, il est quasi impossible de déterminer l’origine de la contamination. Continuer à faire cette distinction, nous mènerait vers une minimisation exagérée des cas communautaires et nous pousserait à donner une confiance exagérée à un système de traçage arithmétique tout à fait obsolète face à un virus qui se diffuse de manière magmatique, spatiale et explosive.

Revenons sur cette typologie ou abandonnons la au plus vite d’autant plus que notre pays est à la croisée des chemins dans cette lutte contre le COVID-19 avec un corps medical très compétent qui a commencé à avoir une certaine renommée internationale.

Un système de traçage obsolète et ridicule qui peut être mis à nu par n’importe quelle démarche métrique et analytique, peut faire tomber tout ce succès comme château de cartes. Cela aussi peut nous mener vers de mauvaises surprises dans le futur proche. Plus proche qu’on le soupçonne.

Un ou des experts en statistiques pures ou de mathémaciens rompus devront intégrer le comité scientifique pour aider à éviter ces types d’erreurs de mesures. Le Sénégal compte de plus que brillants qui pourraient aider à cela s’ils ne sont pas politiciens et passent l’essentiel de leur temps à créer des indices qui placent chaque fois le Sénégal dans les premières place.

Dr. Abdourahmane Ba

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